Édité le 11 avril 2021 par Marie-Christine Lafrenière et Maëva Perez.
Questions-réponses avec Maxime LECLERC
Sous la direction de Marc Amyot et Dolors Planas, chercheuse à l’UQAM, Maxime travaillait déjà pour sa maitrise sur le cycle du mercure et le rôle important qu’y joue le périphyton. Ces communautés de microorganismes autotrophes et hétérophrophes retrouvées un peu partout dans la zone photique des environnements aquatiques (sur des plantes aquatiques, des troncs submerges, des roches etc.) peuvent représenter jusqu’à 95% de l’activité microbienne d’un habitat donné mais sont souvent peu étudiées comparé aux microbes des sédiments dans le cadre d’études sur le mercure.
Après sa maitrise, Maxime s’est lancé dans l’aventure des études du 3e cycle pour poursuivre ses recherches sous un contexte beaucoup plus appliqué. L’étude expérimentale qu’il nous présente aujourd’hui en est un des fruits. Lien vers l'article ici |
Pourquoi cette recherche est-elle importante?
R : On prévoit, de façon globale dans les prochaines décennies, une augmentation considérable de la modification des rivières par la création de divers réservoirs pour répondre aux demandes croissantes en énergie et en eau potable. Contrairement aux projets d’envergure du passé, impliquant la création d’immenses réservoirs, on anticipe plutôt la mise en eau de plusieurs petits réservoirs ou barrages car on assume de façon générale que leurs impacts environnementaux sont moins importants. Cependant, peu d’études existent pour permettre de telles conclusions et c’est pourquoi il est important d’améliorer nos connaissances sur le sujet. Un des impacts de la création de barrages est la production d’un composé qui peut s’accumuler dans les poissons et qui est extrêmement toxique pour l’homme : le méthylmercure. En effet, lors de la création d’un réservoir, donc de l’inondation d’un environnement terrestre, plusieurs changements dont un apport de mercure inorganique au nouvel habitat aquatique et la création de conditions anoxiques, vont promouvoir la production de méthylmercure par les microorganismes.
Qu’est ce qui a motivé cette étude?
R : Dans cette étude, nous nous sommes penchés sur une portion de rivière qui a été affectée par la construction de barrages au fil de l’eau et où une augmentation significative des concentrations de mercure a été observée chez les poissons prédateurs suite à la mise en eau des infrastructures. Comme la production de méthylmercure se fait majoritairement par des processus microbiologiques, nous avons ciblé le périphyton comme compartiment biologique associé à cette production. Le méthylmercure étant bioamplifiable (augmentation des concentrations à chaque niveau de la chaîne alimentaire), le périphyton devient un candidat d’étude de premier choix pour trois raisons principales : 1) il est à la basse de plusieurs réseaux alimentaires de rivières, 2) on sait qu’il est capable de faire la production de méthylmercure mais, 3) il reste peu étudié comparés aux sédiments.
Donc, pour savoir si les microorganismes du périphyton pouvaient être des contributeurs important, nous avons mesuré in situ les taux de méthylation et déméthylation du mercure en leur présence.
R : On prévoit, de façon globale dans les prochaines décennies, une augmentation considérable de la modification des rivières par la création de divers réservoirs pour répondre aux demandes croissantes en énergie et en eau potable. Contrairement aux projets d’envergure du passé, impliquant la création d’immenses réservoirs, on anticipe plutôt la mise en eau de plusieurs petits réservoirs ou barrages car on assume de façon générale que leurs impacts environnementaux sont moins importants. Cependant, peu d’études existent pour permettre de telles conclusions et c’est pourquoi il est important d’améliorer nos connaissances sur le sujet. Un des impacts de la création de barrages est la production d’un composé qui peut s’accumuler dans les poissons et qui est extrêmement toxique pour l’homme : le méthylmercure. En effet, lors de la création d’un réservoir, donc de l’inondation d’un environnement terrestre, plusieurs changements dont un apport de mercure inorganique au nouvel habitat aquatique et la création de conditions anoxiques, vont promouvoir la production de méthylmercure par les microorganismes.
Qu’est ce qui a motivé cette étude?
R : Dans cette étude, nous nous sommes penchés sur une portion de rivière qui a été affectée par la construction de barrages au fil de l’eau et où une augmentation significative des concentrations de mercure a été observée chez les poissons prédateurs suite à la mise en eau des infrastructures. Comme la production de méthylmercure se fait majoritairement par des processus microbiologiques, nous avons ciblé le périphyton comme compartiment biologique associé à cette production. Le méthylmercure étant bioamplifiable (augmentation des concentrations à chaque niveau de la chaîne alimentaire), le périphyton devient un candidat d’étude de premier choix pour trois raisons principales : 1) il est à la basse de plusieurs réseaux alimentaires de rivières, 2) on sait qu’il est capable de faire la production de méthylmercure mais, 3) il reste peu étudié comparés aux sédiments.
Donc, pour savoir si les microorganismes du périphyton pouvaient être des contributeurs important, nous avons mesuré in situ les taux de méthylation et déméthylation du mercure en leur présence.
Peux-tu nous décrire ces expériences?
R : Pour les expérimentations que nous avons fait lors de cette étude il fallait se préparer d’avance! On avait déjà échantillonné le secteur l’année d’avant. J’y avais laissé des substrats au fond de la rivière à six différents sites. Un an plus tard, lorsque nous voulions les récupérer pour faire les incubations in situ, ça a été pas mal difficile de retrouver les substrats laissés l’été précédent. Nous n’avons retrouvé les substrats que de deux sites sur six, les autres probablement emportés par le courant lors de la fonte des glaces ou par un pêcheur curieux. On a quand même été capable de faire quelque chose d’intéressant en ajoutant un troisième site avec des branches colonisées par du périphyton. On prenait donc ce périphyton qu’on mettait dans une bouteille qui avait eu un ajout dosé de mercure et de méthylmercure ayant chacun des signatures isotopiques différentes. On laissait le périphyton dans sa bouteille, dans la rivière là où il avait été pris, puis on a pu suivre l’augmentation de méthylmercure en même temps que sa diminution grâce aux isotopes différents.
Tu mentionnes la perte d’échantillons, as-tu eu d’autres difficultés à surmonter?
R : Absolument. Notre secteur d’échantillonnage était en région éloignée et ça amenait des limitations supplémentaires. Outre le fait que les sites étaient relativement difficiles d’accès (plusieurs heures de déplacement en camion et en zodiac chaque jour), la vraie difficulté était d’être capable d’avoir des sources d’électricité fiables lorsqu’on revenait de la rivière pour faire nos différentes manipulations. C’est une situation qui me faisait rire, considérant que nous passions nos journées à proximité de centrales hydroélectriques !
Peux-tu résumer les grandes trouvailles de cette étude?
R : On a été capable de mesurer des taux de production de méthylmercure par le périphyton dans des conditions naturelles. C'est pas mal plus difficile à faire que je ne l'aurais cru (et ça explique probablement pourquoi les études avec autant de réalisme sont assez rares). À cette production, on a aussi réussi à y associer la communauté microbienne grâce à des outils moléculaires et on a découvert que les principales bactéries responsables de la production de méthylmercure étaient du groupe des bactéries réductrices de fer (alors qu’on voit surtout des réductrices de souffre et des méthanogènes dans la littérature). En fait, dans cette étude, je crois qu’on a surtout été capable de montrer qu’il était pertinent de se pencher sur le périphyton dans le cadre d’études environnementales sur le mercure. Bien sûr nous ne sommes pas les premiers à le faire, mais je crois que cette étude constitue un argument supplémentaire quant à sa pertinence.
Quel souvenir te restera de ce projet?
R : Les gens! Tant mes coéquipiers avec qui j’ai fait cet échantillonnage que ceux qui nous accueillaient à la réserve de Wemotaci. Je me considère aussi particulièrement chanceux d’avoir pu assister aux célébrations du Pow-Wow de Wemotaci, un événement incroyablement riche de culture.
Peux-tu nous décrire ces expériences?
R : Pour les expérimentations que nous avons fait lors de cette étude il fallait se préparer d’avance! On avait déjà échantillonné le secteur l’année d’avant. J’y avais laissé des substrats au fond de la rivière à six différents sites. Un an plus tard, lorsque nous voulions les récupérer pour faire les incubations in situ, ça a été pas mal difficile de retrouver les substrats laissés l’été précédent. Nous n’avons retrouvé les substrats que de deux sites sur six, les autres probablement emportés par le courant lors de la fonte des glaces ou par un pêcheur curieux. On a quand même été capable de faire quelque chose d’intéressant en ajoutant un troisième site avec des branches colonisées par du périphyton. On prenait donc ce périphyton qu’on mettait dans une bouteille qui avait eu un ajout dosé de mercure et de méthylmercure ayant chacun des signatures isotopiques différentes. On laissait le périphyton dans sa bouteille, dans la rivière là où il avait été pris, puis on a pu suivre l’augmentation de méthylmercure en même temps que sa diminution grâce aux isotopes différents.
Tu mentionnes la perte d’échantillons, as-tu eu d’autres difficultés à surmonter?
R : Absolument. Notre secteur d’échantillonnage était en région éloignée et ça amenait des limitations supplémentaires. Outre le fait que les sites étaient relativement difficiles d’accès (plusieurs heures de déplacement en camion et en zodiac chaque jour), la vraie difficulté était d’être capable d’avoir des sources d’électricité fiables lorsqu’on revenait de la rivière pour faire nos différentes manipulations. C’est une situation qui me faisait rire, considérant que nous passions nos journées à proximité de centrales hydroélectriques !
Peux-tu résumer les grandes trouvailles de cette étude?
R : On a été capable de mesurer des taux de production de méthylmercure par le périphyton dans des conditions naturelles. C'est pas mal plus difficile à faire que je ne l'aurais cru (et ça explique probablement pourquoi les études avec autant de réalisme sont assez rares). À cette production, on a aussi réussi à y associer la communauté microbienne grâce à des outils moléculaires et on a découvert que les principales bactéries responsables de la production de méthylmercure étaient du groupe des bactéries réductrices de fer (alors qu’on voit surtout des réductrices de souffre et des méthanogènes dans la littérature). En fait, dans cette étude, je crois qu’on a surtout été capable de montrer qu’il était pertinent de se pencher sur le périphyton dans le cadre d’études environnementales sur le mercure. Bien sûr nous ne sommes pas les premiers à le faire, mais je crois que cette étude constitue un argument supplémentaire quant à sa pertinence.
Quel souvenir te restera de ce projet?
R : Les gens! Tant mes coéquipiers avec qui j’ai fait cet échantillonnage que ceux qui nous accueillaient à la réserve de Wemotaci. Je me considère aussi particulièrement chanceux d’avoir pu assister aux célébrations du Pow-Wow de Wemotaci, un événement incroyablement riche de culture.