Édité le 09 avril 2021 par Marie-Christine Lafrenière et Maëva Perez.
Questions-réponses avec Simon MORVAN
Après avoir complété sa formation d'ingénieur en génie biologique à l'Université de Technologie de Compiègne (France), Simon souhaitait continuer à travailler en recherche mais pas forcément poursuivre au doctorat. Ayant fait deux projets de stage, un centré sur de la microbiologie et l'autre sur l'utilisation de biofertilisants à base d'extraits d'algue il était surtout intéressé dans la recherche autour du monde végétal. Le projet de doctorat que lui a proposé Mohamed Hijri sur la thématique du microbiote en milieu agricole l’a séduit. L’article dont il nous parle aujourd’hui est une première étude réalisée dans le cadre de sa thèse sur microbiote du bleuetier sauvage. Lien vers l'article ici |
Qu’est ce qui a motivé cette étude?
R : Au moment où l'échantillonnage a été mené, personne n'avait étudié les communautés microbiennes associées à l'environnement racinaire du bleuetier. Ici, nous nous sommes intéressés au bleuetier sauvage qui pousse dans des conditions assez hostiles (acidité et faible teneur en nutriment du sol). Au contraire du bleuetier corymbe (également appelé highbush blueberry en anglais) dont la culture est plus comparable à celle d'autres cultures en verger, les bleuetières de bleuets sauvages sont établies dans des espaces où les bleuetiers sont déjà préexistants, généralement des forêts qui sont abattues ou d'anciennes terres agricoles où les bleuetiers se sont implantés. Leur microbiote racinaire est donc d’un intérêt particulier puisque a priori il est déjà optimal pour la croissance de ces petits fruits très appréciés.
Certaines bactéries pourraient par exemple avoir des effets bénéfiques pour la croissance et le rendement des bleuetiers. Les champignons mycorhiziens éricoïdes (un type de mycorhize qui se forme chez la famille de plante Ericacées) eux aussi sont des alliés de taille car ils permettent de dégrader la matière organique et ainsi fournir des nutriments à leur plante hôte. Cependant, les mycorhizes éricoïdes sont assez peu étudiées comparé aux mycorhizes arbusculaires (qu'on retrouve chez 80% des espèces végétales terrestres), ou aux champignons ectomycorhiziens (qui sont davantage associés à des espèces ligneuses).
Peux-tu résumer les grandes trouvailles de cette étude?
R : Nous avons trouvé que l'ordre fongique qui dominait la communauté de champignon (Helotiales) est celui qui contient la majorité des espèces connues de champignons mycorhiziens éricoïdes. Au niveau des bactéries, ce sont les Rhizobiales qui dominent la communauté. Cet ordre bactérien est notamment connu pour ses capacités de fixation d'azote atmosphérique. Nous avons également trouvé que plusieurs espèces de bactéries fixatrices d'azote ainsi que de champignons mycorhiziens éricoïdes étaient significativement corrélés au taux d'azote foliaire des bleuetiers ce qui suggèrent que leur présence est bénéfique.
Est-ce que les découvertes de cette étude peuvent être appliqués pour l’agriculture, pour la fabrication d’un engrais bio par exemple ?
R : Les espèces microbiennes identifiées comme ayant un potentiel effet sur le taux d'azote foliaire (corrélation ≠ cause) pourraient en effet être utilisée en tant que bio-inoculant mais il faut d’abord vérifier que ces espèces ont bel et bien un effet dans une étude subséquente où l’on ferait des tests d’inoculation.
R : Au moment où l'échantillonnage a été mené, personne n'avait étudié les communautés microbiennes associées à l'environnement racinaire du bleuetier. Ici, nous nous sommes intéressés au bleuetier sauvage qui pousse dans des conditions assez hostiles (acidité et faible teneur en nutriment du sol). Au contraire du bleuetier corymbe (également appelé highbush blueberry en anglais) dont la culture est plus comparable à celle d'autres cultures en verger, les bleuetières de bleuets sauvages sont établies dans des espaces où les bleuetiers sont déjà préexistants, généralement des forêts qui sont abattues ou d'anciennes terres agricoles où les bleuetiers se sont implantés. Leur microbiote racinaire est donc d’un intérêt particulier puisque a priori il est déjà optimal pour la croissance de ces petits fruits très appréciés.
Certaines bactéries pourraient par exemple avoir des effets bénéfiques pour la croissance et le rendement des bleuetiers. Les champignons mycorhiziens éricoïdes (un type de mycorhize qui se forme chez la famille de plante Ericacées) eux aussi sont des alliés de taille car ils permettent de dégrader la matière organique et ainsi fournir des nutriments à leur plante hôte. Cependant, les mycorhizes éricoïdes sont assez peu étudiées comparé aux mycorhizes arbusculaires (qu'on retrouve chez 80% des espèces végétales terrestres), ou aux champignons ectomycorhiziens (qui sont davantage associés à des espèces ligneuses).
Peux-tu résumer les grandes trouvailles de cette étude?
R : Nous avons trouvé que l'ordre fongique qui dominait la communauté de champignon (Helotiales) est celui qui contient la majorité des espèces connues de champignons mycorhiziens éricoïdes. Au niveau des bactéries, ce sont les Rhizobiales qui dominent la communauté. Cet ordre bactérien est notamment connu pour ses capacités de fixation d'azote atmosphérique. Nous avons également trouvé que plusieurs espèces de bactéries fixatrices d'azote ainsi que de champignons mycorhiziens éricoïdes étaient significativement corrélés au taux d'azote foliaire des bleuetiers ce qui suggèrent que leur présence est bénéfique.
Est-ce que les découvertes de cette étude peuvent être appliqués pour l’agriculture, pour la fabrication d’un engrais bio par exemple ?
R : Les espèces microbiennes identifiées comme ayant un potentiel effet sur le taux d'azote foliaire (corrélation ≠ cause) pourraient en effet être utilisée en tant que bio-inoculant mais il faut d’abord vérifier que ces espèces ont bel et bien un effet dans une étude subséquente où l’on ferait des tests d’inoculation.
Pourquoi es-tu fier de ce papier?
R : Ce papier est important pour moi car je pense qu'il faut davantage se tourner vers la compréhension des systèmes biologiques pour pouvoir produire de manière durable.
Et puis cet article est mon premier. J'ai pris le projet en cours alors que l'échantillonnage ainsi que la majeure partie des analyses en laboratoire avaient déjà été complétés. Bien que cela ait permis d'accélérer la publication de l'article, c'était assez compliqué de s'attaquer directement à l'analyse des résultats et de bien s'approprier l'étude. J'ai quand même réussi à me former rapidement en bio-informatique et sur les méthodes statistiques que je devais utiliser. Ce papier m'a également donné l'opportunité de publier un article de vulgarisation dans la revue Microbiologist : https://issuu.com/societyforappliedmicrobiology/docs/sfammi_3 .
Se former aux statistiques et à la bio-informatique est une épreuve que beaucoup étudiant.e.s aux cycles supérieurs doivent braver. As-tu des conseils et/ou ressources à partager?
R : Je n'aimais ni les statistiques, ni la programmation durant mes études d'ingénieur en génie biologique donc autant vous dire que je n'étais pas super enjoué de devoir m'attaquer directement aux deux pour débuter. J'ai commencé le projet en prenant le fameux cours « Écologie Numérique » de Pierre Legendre qui m'a permis de me familiariser avec les analyses multivariées et l'utilisation de R qui était tout nouveau pour moi. Ce cours est un gros morceau (je n'ai pas fait grand-chose d'autre du semestre à part ce cours) mais le projet évalué dans le cadre du cours permet vraiment de s'approprier les notions du cours qui sont d'intérêt pour nos études.
En parallèle, j'ai suivi les ateliers R du CSBQ dont le matériel est libre d'accès. Je recommande grandement de suivre ces ateliers donnés chaque année et gratuits pour les membres du CSBQ. Au niveau de la programmation, il n'y a pas de secret : il faut pratiquer pour s'améliorer et savoir chercher la réponse à ses erreurs / ses problèmes sur internet. A mon grand étonnement, je prends maintenant un certain plaisir à faire marcher un code et à personnaliser mes graphiques.
Pour ceux qui font de l'écologie microbienne, ce site est pas mal utile. Je recommande également d'utiliser DADA2 pour la bio-informatique et Phyloseq pour les analyses statistiques subséquentes.
Quelle est la prochaine étape pour toi?
R : J'ai deux autres études prévues sur le microbiote du bleuetier sauvage. L'une vise à savoir si la fauche thermique impacte le microbiote, l'autre vise à étudier les potentiels changement de communauté microbienne en fonction du type de fertilisation ainsi que du stade de croissance du bleuetier.
La fauche thermique? Qu’est-ce que c’est?
R : La fauche thermique est une pratique agricole utilisée en bleuetière qui consiste à brûler les tiges des bleuetiers une fois la récolte effectuée. Le bleuetier sauvage a la particularité d'être une culture qui s'étale sur 2 ans : la première année, dite végétative, les tiges émergent du rhizome et les bourgeons floraux se forment à la fin de l'été. Une fois l'hiver passé, les tiges reprennent leur développement pour produire des fruits à la fin août de la deuxième année, dite productive. La fauche, qu'elle soit thermique ou mécanique, vise à maintenir un bon rendement qui décroit progressivement si on ne fauche pas les tiges.
Pour finir, as-tu une recette à base de bleuets préférée?
R : Cette recette de gâteau est super! :
http://qc.allrecipes.ca/recette/23625/gateau-aux-bleuets-qui-fond-dans-la-bouche.aspx
R : Ce papier est important pour moi car je pense qu'il faut davantage se tourner vers la compréhension des systèmes biologiques pour pouvoir produire de manière durable.
Et puis cet article est mon premier. J'ai pris le projet en cours alors que l'échantillonnage ainsi que la majeure partie des analyses en laboratoire avaient déjà été complétés. Bien que cela ait permis d'accélérer la publication de l'article, c'était assez compliqué de s'attaquer directement à l'analyse des résultats et de bien s'approprier l'étude. J'ai quand même réussi à me former rapidement en bio-informatique et sur les méthodes statistiques que je devais utiliser. Ce papier m'a également donné l'opportunité de publier un article de vulgarisation dans la revue Microbiologist : https://issuu.com/societyforappliedmicrobiology/docs/sfammi_3 .
Se former aux statistiques et à la bio-informatique est une épreuve que beaucoup étudiant.e.s aux cycles supérieurs doivent braver. As-tu des conseils et/ou ressources à partager?
R : Je n'aimais ni les statistiques, ni la programmation durant mes études d'ingénieur en génie biologique donc autant vous dire que je n'étais pas super enjoué de devoir m'attaquer directement aux deux pour débuter. J'ai commencé le projet en prenant le fameux cours « Écologie Numérique » de Pierre Legendre qui m'a permis de me familiariser avec les analyses multivariées et l'utilisation de R qui était tout nouveau pour moi. Ce cours est un gros morceau (je n'ai pas fait grand-chose d'autre du semestre à part ce cours) mais le projet évalué dans le cadre du cours permet vraiment de s'approprier les notions du cours qui sont d'intérêt pour nos études.
En parallèle, j'ai suivi les ateliers R du CSBQ dont le matériel est libre d'accès. Je recommande grandement de suivre ces ateliers donnés chaque année et gratuits pour les membres du CSBQ. Au niveau de la programmation, il n'y a pas de secret : il faut pratiquer pour s'améliorer et savoir chercher la réponse à ses erreurs / ses problèmes sur internet. A mon grand étonnement, je prends maintenant un certain plaisir à faire marcher un code et à personnaliser mes graphiques.
Pour ceux qui font de l'écologie microbienne, ce site est pas mal utile. Je recommande également d'utiliser DADA2 pour la bio-informatique et Phyloseq pour les analyses statistiques subséquentes.
Quelle est la prochaine étape pour toi?
R : J'ai deux autres études prévues sur le microbiote du bleuetier sauvage. L'une vise à savoir si la fauche thermique impacte le microbiote, l'autre vise à étudier les potentiels changement de communauté microbienne en fonction du type de fertilisation ainsi que du stade de croissance du bleuetier.
La fauche thermique? Qu’est-ce que c’est?
R : La fauche thermique est une pratique agricole utilisée en bleuetière qui consiste à brûler les tiges des bleuetiers une fois la récolte effectuée. Le bleuetier sauvage a la particularité d'être une culture qui s'étale sur 2 ans : la première année, dite végétative, les tiges émergent du rhizome et les bourgeons floraux se forment à la fin de l'été. Une fois l'hiver passé, les tiges reprennent leur développement pour produire des fruits à la fin août de la deuxième année, dite productive. La fauche, qu'elle soit thermique ou mécanique, vise à maintenir un bon rendement qui décroit progressivement si on ne fauche pas les tiges.
Pour finir, as-tu une recette à base de bleuets préférée?
R : Cette recette de gâteau est super! :
http://qc.allrecipes.ca/recette/23625/gateau-aux-bleuets-qui-fond-dans-la-bouche.aspx